La Vanille Nature Park : Ah… les cro cro cro les crocodiles !

Les crocodiles vivent immergés dans les cours d’eau stagnante. À Maurice, 2 000 crocodiles du Nil vivent en captivité à La Vanille Nature Park. C’est une réserve d’une superficie d’environ cinq hectares à Rivière-des-Anguilles. Découverte.

Jeudi 14 juillet, 10 heures. Nous nous retrouvons devant un bassin à l’entrée de La Vanille Nature Reserve avec Arounen Moonoosamy, le responsable des guides. Une dizaine de crocodiles du Nil, mâles et femelles, se prélassent au soleil, l’un sur l’autre avec quelques-uns dans l’eau, la gueule grande ouverte.

« Comme les crocodiles ne transpirent pas, ils ouvrent souvent leur gueule pour se rafraîchir quand il fait trop chaud », explique Arounen Moonoosamy. Le parc compte actuellement 2 000 crocodiles, dont une centaine d’adultes. Parmi, un Caiman (Red Caiman -Jakara) et 11 bébés Caiman, ainsi que cinq alligators (4 adultes et 1 bébé).

« Lorsque le parc a ouvert ses portes en 1985, des crocodiles du Nil et africains ont été importés de Madagascar. Le mâle est d’une longueur de 5 mètres et pèse environ une tonne. Il peut aller jusqu’à 7 mètres de long. Quant à la femelle qui a le museau plus large, elle mesure environ 3,5 mètres de long et pèse 500 kilos. »

Ces crocodiles sont nourris avec 5 kilos de poulet ou de viande deux à trois fois par semaine. « Comme ils sont des animaux à sang froid, ils dépendent beaucoup de la température et prennent du temps pour la digestion de leur nourriture. Ils ont tendance à manger beaucoup moins en hiver », fait savoir Arounen Moonoosamy. Les crocodiles ont 68 dents pointues – ils en changent au moins 20 à 50 fois pendant toute leur vie ! – et ne mâchent pas leur nourriture mais l’avalent à grande portion.

Les crocodiles peuvent rester immobiles pendant 18 heures. Et ils peuvent rester dans l’eau pendant 30 minutes ou une heure sans respirer en ralentissant le battement de leur cœur. « Ils ont une troisième paupière transparente qui se trouve sur le côté des yeux. C’est ce qui leur permet de rester dans l’eau sans qu’ils soient affectés et avec leur capacité de bloquer leur palais avec leur langue, ils peuvent aussi croquer dans l’eau sans s’étouffer. »

La ponte des œufs

Plusieurs bassins de reproduction ont été aménagés dans le parc. L’accouplement se fait de mars à août. « Les femelles vont pondre vers octobre et novembre. Par instinct, elles vont choisir un compartiment dans le sable pour faire une couvée de 30 à 40 œufs, une seule fois par an. » Les soigneurs transféreront les œufs dans une couveuse. Ceux-ci prendront environ trois mois pour éclore. « C’est la température qui va déterminer le sexe du bébé crocodile : 26 °C-30°C pour avoir des femelles et 30 °C à 33 °C pour avoir des mâles. »

Les bébés hors de l’œuf pèsent environ 80g et naissent avec 68 dents ainsi qu’une dent au bout du museau pour casser l’œuf, qui tombera par la suite avec le temps. « Ils commenceront à manger deux à trois jours après leur naissance. »

Un peu plus loin, nous trouvons un bel iguane sur un tronc d’arbre. « Je vous présente Octar Jr. C’est un iguana vieux de 10 ans. Il fait partie des Iguana Iguana d’Amérique du Sud qui mesurent 1 m 50 à 2 m 10 de long. »

Il se nourrit de fruits, légumes, feuilles et fleurs. Dans cette partie du globe, il est une source importante de nourriture. « En Europe, il est un animal domestique. Ici, vu qu’il est apprivoisé, nous proposons une activité aux visiteurs du parc. Ils peuvent le voir de près et le toucher durant des heures spécifiques. »

Les visiteurs peuvent nourrir les bébés crocodiles à l’aide d’une canne à pêche.

Tour des lieux

Après Octar Jr, nous rencontrons la Rodrigues Fruit Bat, espèce endémique de Rodrigues dont la tête ressemble à un renard, ayant un rôle important dans la pollinisation et la dispersion des graines des plantes. Ils se nourrissent de fruits et légumes.

Selon notre guide, la chauve-souris mauricienne était le seul mammifère sur l’île. D’autres ont été introduits bien après. « L’activité de l’homme et des mammifères introduits ainsi que la déforestation ont fait que les prédateurs tels que rats, singes et sangliers ont mangé les oiseaux et reptiles. Nous avons perdu quelque 21 espèces d’oiseaux et de reptiles. »

Autre escale : la cage à Maki où nous trouvons Tsiky et sa tribu. Originaires de France, ces lémuriens de caractère très doux étaient au nombre de 4 adultes à leur arrivée. Maintenant, on compte 10 adultes et 6 bébés. En voie de disparition, ils sont protégés par la loi. Ils se nourrissent particulièrement de fruits et de légumes. « Ils adorent les raisins et les ‘brèdes’ », dit Arounen Moonoosamy avec le sourire.

Tout près, nous admirons un beau Echo-Parakeet. « Il n’en restait qu’une vingtaine. Grâce à un travail de conservation par la Mauritius Wildlife Foundation, leur population est passée à environ 700 à 800. »

Brin d’histoire

Spécialistes en bioculture, Owen et Mary-Ann Griffiths sont les directeurs de La Vanille Nature Reserve, Ebony Forest Reserve Chamarel et François Leguat Reserve Rodrigues. La Group Manager Anne Christine Herbst explique que c’est en 1985 que La Vanille Crocodile Farm a ouvert ses portes à Senneville, Rivière-des-Anguilles. « Le but principal étant l’élevage de ces reptiles, le parc a été appelé La Vanille comme la plante du même nom qui jadis était cultivée dans la région. »

Au fil du temps, le parc a évolué en parc animalier et éducatif avec l’introduction d’autres reptiles, mammifères et oiseaux endémiques à la région. Aussi, un musée sur le dodo et les ammonites, et « un insectarium qui abrite une des plus grandes collections privées au monde ».

Nursery des crocodiles

Sur place, nous rencontrons le soigneur Eddy Mercidas. Il travaille à La Vanille Nature Reserve depuis 32 ans. « Lors de la ponte, mon équipe et moi ramassons les œufs pour les mettre dans la couveuse. L’éclosion prend deux à trois mois. Ensuite, nous nous occupons des nouveau-nés. Selon leur poids, nous leur donnons 3g-4g de viande ou de poulet. Nous augmentons la quantité de nourriture au fur et à mesure qu’ils grandissent dans les bassins », explique-t-il.

Au bassin des bébés crocodiles, les visiteurs peuvent les nourrir à l’aide d’une canne à pêche avec du poulet ou de la viande comme appât.

Un millier de tortues

Les tortues peuvent être nourries avec des « Fey Torti » achetées à Rs 25.

Dans l’allée menant à la savane du parc, des touristes ont des feuilles de Scaevola dites « fey torti » à la main, achetées à Rs 25. Les tortues en raffolent.

« Ce sont les tortues géantes des Seychelles (Aldabra). Les tortues de Maurice, de la région et de Rodrigues ont disparu il y a 200 ans », dit Arounen Moonoosamy.

Les tortues sont numérotées et dotées de puces électriques pour le contrôle de leur identité et le suivi de leur reproduction. « La plus grosse des tortues s’appelle Domino. C’est un mâle âgé de 110 ans, pesant 275 kilos. Dans le parc, il y a un millier de tortues dont 900 jeunes et bébés. »

Le sexe des tortues est déterminé lorsqu’elles ont 15-20 ans grâce au plastron se trouvant sous leur carapace. « Pour un mâle, c’est plus creux. Et pour la femelle, c’est tout plat. »

Les femelles font une ou deux couvées de 8 à 25 œufs par an. « Elles pondent sur la terre. Si celle-ci est sèche, les tortues la mouillent avec leur urine et avec leurs pattes arrière, elles la creusent pour y pondre leurs œufs et la recouvrent par la suite. »

Dans des couveuses, l’éclosion des oeufs prend trois à quatre mois. « Dans la nature, cela prend environ six mois. »

Les bébés étant fragiles, ils sont mis dans des couveuses, à l’abri des prédateurs. « De nos jours, les tortues ne peuvent pas rester dans la nature. Elles sont mises dans les réserves naturelles. Ici, nous avons des tortues étoilées de Madagascar, une espèce en voie de disparition. »

La conservation se fait à Maurice, Rodrigues et Madagascar où une équipe de 10 personnes ont été formées pour s’occuper d’elles. En l’absence d’un programme de conservation, cette espèce disparaîtra en 20 ans, prévient Arounen Moonoosamy. « Ces tortues sont victimes de braconnage et des feux de forêts, entre autres. »

Insectarium et boutique de souvenirs

La collection d’insectes et de papillons de l’insectarium a 50 ans.

L’insectarium regroupe quelque 26 000 espèces d’insectes de plusieurs pays du monde. Elles appartiennent au collectionneur français Jacques Siedlecki, qui a élu domicile à Maurice. « Cette collection est vieille de 50 ans. Elle a été initiée par les parents de Jacques Siedlecki », indique Arounen Moonoosamy.

On retrouve coléoptères de Madagascar, insectes et arthropodes, de belles collections de papillons et insectes de Maurice, de Rodrigues et d’Agaléga…. Également exposée, la punaise à tête d’homme.

À la boutique de souvenirs, plusieurs articles dérivés de la peau de crocodile du Nil sont exposés. Cela se fait dans le respect de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES). Les crocodiles de 3 à 6 ans mesurant 1 m 30 à 1 m 80 de long sont utilisés. Leur peau est envoyée au Zimbabwe et de retour à Maurice, est transformée dans des usines en sacs, ceintures, savates, porte-clés, bracelets…

Les têtes sont empaillées et les ventres utilisés pour faire des sacs. Tandis que leurs pattes sont utilisées pour faire des gratte-dos. Et leurs dents finissent sous forme de pendentifs entre autres.

Leur chair, qui a un goût poulet-poisson, est sublimée par le chef du restaurant Le Crocodile Affamé situé dans la réserve. Au menu : kebab de crocodile, aigre-doux de crocodile, beignets de crocodile, burger de crocodile, steak de crocodile, chasive de crocodile et du crocodile à la vanille.