Veeresh Perianen et son bureau… sous-marin
Sortons des clichés du grand bleu avec ses beaux poissons et plongeons dans les eaux de… la rade de Port-Louis. Là où le plongeur commercial Veeresh Perianen gagne sa vie.
Il n’est peut-être pas grand. N’a peut-être pas des muscles saillants. Mais du courage, il en a à en revendre. Car pour faire le métier qu’il exerce, il en faut et pas qu’un peu. Veeresh Perianen, 23 ans, dit Sanju, est plongeur commercial, ce qu’on appelle aussi scaphandrier, au sein de Dive Solutions, à Port-Louis.
Si on parle souvent des ramasseuses de palourdes et des pêcheurs, peu est dit sur les scaphandriers qui travaillent pendant
de longues heures d’affilée dans les fonds marins. À l’occasion de la Journée mondiale de la mer observée le 30 septembre 2022,
Sanju nous en dit plus sur ce métier.
Le jeune homme de 23 ans est passionné par le monde marin depuis tout petit. « Je ne me voyais pas être enfermé dans un bureau pendant toute une journée. Alors, j’ai voulu faire de la mer… mon bureau », dit-il dans un éclat de rire. C’est à l’âge de 19 ans que cet ancien élève du Vacoas SSS et du Mauricia Institute, entame des cours de plongée auprès de la Confédération mondiale des activités subaquatiques (CMAS), qui comprend plus de 130 fédérations sur les cinq continents. Celle-ci offre un cadre international pour la qualification des plongeurs et instructeurs en plongée sous- marine. Afin de compléter la formation soutenue par Dive Solutions, son premier employeur, Sanju se rend à Durban en Afrique du Sud, plus exactement au sein de l’une des meilleures écoles de plongée commerciale où il obtient sa licence en 2018.
Que fait donc un plongeur commercial ?
C’est un plongeur professionnel, parfois appelé plongeur industriel, pour le distinguer du moniteur de plongée, explique-t-il. « Nous, nous effectuons des explorations et des travaux en eaux profondes tels qu’entretien et maintenance des bateaux, enquêtes photographiques et vidéoraphiques. Ainsi, nous devons connaître et respecter les procédures pour accéder au chantier, travailler en profondeur et remonter à la surface en toute sécurité. » Dive Solutions propose aussi des inspections, récupération, soudure sous-marine etc.
Un plongeur professionnel peut aussi exercer pour le compte de secteurs très variés, précise Sanju. À savoir travaux maritimes, opérations de génie civil, industrie nucléaire ou pétrolière et archéologie sous- marine, entre autres. Le plongeur professionnel dispose d’un équipement spécifique pour évoluer en profondeur, comme des bouteilles et combinaison avec casque narguilé, etc. Il communique régulièrement avec les ingénieurs et techniciens restés en surface par un système de communication audio et vidéo.
« Pour faire ce métier qui est intense et risqué, la pratique de la plongée et de ses règles ne suffit pas. Des compétences techniques ainsi qu’une excellente condition physique sont indispensables. Ce qui explique pourquoi, en général, le plongeur industriel se reconvertit dès l’âge de 40 ans », soutient Sanju.
Journée type
S’il y a des opérations à faire sous mer, Sanju travaille de six heures du matin à 18 heures. Au cas contraire, il a des horaires de bureau« normaux ». Le week-end, il bosse uniquement en cas d’interventions.
Il y a des étapes internes à suivre et il faut aussi avoir l’approbation des autorités portuaires avant toute intervention. « Nous effectuons une vérification minutieuse de tous nos équipements avant chaque opération. » Opérant selon les normes ISO 9001 et IMCA, Dive Solutions dispose d’une série de procédures à respecter, touchant notamment les aspects purement opérationnels ainsi que la sécurité.
Dans le cadre d’une intervention, sa journée démarre à bord de la barge Alpha 1. Celle-ci est pourvue de tout ce que son équipe et lui ont besoin pour toutes les opérations sous-marines. Alpha 1 est également équipée des facilités pour qu’ils se jettent à l’eau et d’une échelle pour les aider à remonter à la surface.
Qui peut faire cette plongée ?
« Les plongeurs commerciaux ayant reçu la formation reconnue par les instances régulatrices locales et internationales peuvent plonger », répond Sanju. C’est un jeu d’enfants pour les plongeurs de Dive Solutions, habitués des eaux profondes, de descendre dans le grand bleu pour se rendre sur leur lieu de travail, souvent en compagnie d’un banc de dauphins. Quant aux poissons, ils sont rares parce que l’équipe de Dive Solutions plonge à des endroits très profonds qui peuvent parfois même dépasser les 80 mètres. « Nous ne voyons pas le fond marin (sea bed) et les poissons ont tendance à rester au bas. »
Comme la sécurité est un aspect essentiel de son métier, Sanju souligne que toutes les interventions en milieu sous-marin s’effectuent en équipe. Chez Dive Solutions, fait-il ressortir, « il y a un véritable esprit d’équipe qui établit la confiance entre collaborateurs. Nous savons que nous pouvons compter les uns sur les autres si l’un d’entre nous se retrouve en difficulté pendant une opération ».
D’autre part, le jeune plongeur ne nie pas que c’est un défi de rester sous l’eau pendant plusieurs heures d’affilée, pouvant aller jusqu’à 6 ou 7 heures. Ou encore de plonger dans des conditions extrêmes, comme par exemple lors du déversement d’huile lourde dans la mer lors du naufrage du MV Wakashio en août 2020.
« Les opérations à la suite du naufrage du MV Wakashio où nous avions une mauvaise visibilité en plus d’une eau froide, polluée, avec des courants, constituent un exemple classique des conditions difficiles auxquelles nous faisons face au quotidien. Nous y parvenons grâce à notre formation, nos techniques de plongée, la coordination sous l’eau avec nos collègues ainsi qu’une condition physique irréprochable. » Cela demande beaucoup de discipline et de sacrifices. Et de la passion avant tout, dit-il. Car, assure Sanju, le monde sous- marin est un monde à part. « Quand vous êtes passionné par votre métier, c’est dur de s’arrêter. »
Amélioration du cadre juridique
Selon Sanju, le cadre juridique mérite d’être amélioré pour que la pratique soit alignée sur les normes et enjeux actuels. Il cite les bateaux de pêche et plaisanciers qui devraient mieux respecter la limite d’espace à garder lorsqu’il y a des opérations de plongée. « Les bateaux s’aventurent souvent à proximité des plongeurs, ce qui représente un réel danger. » Il est aussi nécessaire de durcir les lois pour l’obtention d’une licence de plongeur professionnel, dit-il. « Ceux désirant faire ce métier doivent impérativement suivre les formations appropriées auprès d’institutions reconnues. Cela réduira les risques d’accidents et garantira au client un service de qualité, tout en respectant les normes établies par l’Organisation maritime internationale (OIM) », estime-t-il.
Dive Solutions en quelques mots
Créé en 2009, Dive Solutions est un prestataire de solutions et d’activités sous- marines utilisant des technologies de pointe respectueuses de l’environnement à travers son pôle recherche & développement. David Huggett, qui en est l’Operations Manager, explique que les services sont fournis dans le respect des normes locales (Mauritius Ports Authority) et mondiales (OMI). « Les services proposés comprennent l’entretien spécialisé des hélices par système de récupération, les enquêtes CCTV (état général, achat ou vente, encrassement), les enquêtes photographiques et vidéographiques, l’enlèvement des cordages et tout autre obturation, les décharges pour faciliter les réparations à l’arrivée des navires. »
L’entreprise a également la volonté de fournir des services écoresponsables qui sensibilisent et motivent l’ensemble de l’écosystème portuaire et ses clients à mettre en œuvre de bonnes pratiques environnementales. Et de conclure que Dive Solutions emploie uniquement des plongeurs professionnels ayant suivi la formation internationale et détenteurs d’une licence appropriée pour effectuer les travaux en mer.
Saviez-vous que ?
La CMAS a créé un Système international des certificats de formation de plongée, comprenant les normes de formation pour les plongeurs, les plongeurs de spécialité, les plongeurs techniques et les plongeurs de « Leadership ». Grâce à cela,
le certificat des plongeurs est reconnu partout dans les
pays membres de la
CMAS.